Avoir des alpagas | c’est un projet ou un style de vie pour toi ?

La possession ou l’élevage d’alpagas a beau être attirant, il n’est cependant pas pour tout le monde ! 

J’ai écrit cet article pour te donner une petite idée de ce qui t’attend. Prends la peine de le lire; trop de gens ont démarré un cheptel pour abandonner quelques années à peine plus tard parce que ce n’était pas pour eux !

Ce petit 5 minutes pourrait changer les prochaines années de ta vie positivement, que tu te lances dans le projet… ou pas !

Travail physique

foin pour élevage d'alpagas

Avoir des alpagas ou élever des alpagas, bien que moins demandant qu’un autre type d’activité agricole, demande un minimum de travail manuel et physique.

Si tu as des limitations, il est toujours possible de se débrouiller si un membre de la famille ou un employé ( attention, ce n’est pas facile à trouver ! ) peut s’occuper des tâches relatives aux animaux. Par contre, si c’est un employé, ton projet sera beaucoup plus difficile à rentabiliser.

Il va te falloir soulever des poids très régulièrement (ex; sacs de moulée ou petites balles de foin), soit des poids de 30-50 lb.

Une femme seule est généralement capable de s’occuper des alpagas au quotidien malgré tout.

Le travail le plus redondant (et journalier) est celui de ramasser les excréments dans les litières, de nettoyer, de nourrir les animaux et de les abreuver.

Pour certains soins directs aux animaux, par contre, il est préférable ou même essentiel d’être deux; pour les vaccins, les vermifuges oraux et la coupe des onglons, par exemple, où l’un tient l’animal et l’autre donne les soins.

Dans ce cas, une personne seule doit trouver l’aide nécessaire; c’est souvent le conjoint, un partenaire d’affaire ou un ami proche/voisin qui joue ce rôle.

On peut généralement prévoir la plupart de ces soins, mais d’autres devront être fait rapidement et c’est particulièrement le cas quand il y a des grossesses et des naissances (exemple; aide pour une naissance difficile, problème avec un cria qui a de la difficulté à boire et dont la femelle ne collabore pas… ). En ce sens, il est plus facile de posséder des alpagas seul que d’en élever.

La gestion du foin (engranger du foin) est aussi demandant physiquement et demande souvent d’être bien entouré à moins qu’il y ait des ententes de prises avec un producteur.

L’énergie que demande la tonte et le travail de la fibre…

cours tonte alpaga - tondre alpaga toison

La tonte et le travail primaire sur la fibre sont une autre raison d’avoir une bonne forme physique quand on possède des alpagas.

Bien qu’il soit possible de faire venir un tondeur, cela réduit les profits en fin d’année et il n’est pas aisé de trouver des tondeurs qui savent tondre des alpagas dans certaines régions (ou même qui veulent se déplacer, quand le cheptel est trop petit).

Faire la tonte soi-même permet de prendre soin des animaux à notre goût, ce qui n’est pas le cas avec le tondeur, qui va imposer sa méthode et ses façons de faire.

Envie d’avoir une proximité supplémentaire avec les alpagas dans l’année ou plus de temps pour donner des soins pendant que l’animal est attaché au tapis de tonte ? Faire la tonte soi-même permet cette flexibilité… mais attention; faire la tonte, c’est aussi très demandant physiquement !

Il faut se lever et s’accroupir souvent (surtout si on tond sur un tapis) et faire des efforts pour immobiliser l’animal au départ. Les muscles les plus sollicités sont les muscles du bas du dos, les cuisses et le fessier.

Si on considère la rentabilité, le tri de la fibre, après la tonte, demande aussi une certaine dose de temps et d’énergie.

Le tri de la fibre, qui se fait derrière une table spéciale, requiert surtout de rester debout longtemps et de s’étirer d’un bout à l’autre de la table. Le bas du dos est le plus sollicité dans ce cas.

Temps disponible

Il faut consacrer au minimum 30-45 minutes QUOTIDIEN aux soins de base des animaux selon la grosseur du troupeau.

Ici, chaque train quotidien demande entre 45 minutes et 1h15 chaque jour, pour environ 35 alpagas. Il pourrait être plus long, mais nous avons beaucoup investis dans les dernières années pour le faciliter le tout et couper le temps passé à faire des corvées.

Périodiquement, on dois prendre un peu plus de temps pour donner des soins moins fréquents, comme peser les animaux et couper les onglons (ici, environ 2-3h aux mois pour 35 alpagas), donner les vaccins et les vermifuges ou faire la tonte (dépendant ta rapidité et les soins faits pendant la tonte, entre 5 minutes et 40 minutes PAR ANIMAL).

Temps disponible pour l'élevage d'alpagas

Selon ton projet et de tes ambitions, tu peux consacrer facilement beaucoup plus de temps à ton cheptel.

Tu veux continuer à travailler à temps plein ?

Aucun problème, certains le font !

Il est possible de faire effectuer également certains soins par le vétérinaire ou la tonte par un tondeur professionnel.

Un employé pourrait te permettre de libérer des heures supplémentaires.

Tu pourrais même mettre tes alpagas en pension !

Mais attention; moins de temps disponible pour ton élevage, ça veut aussi dire beaucoup moins de chance d’avoir les profits voulus en fin d’année et même moins de chance d’atteindre la rentabilité un jour.

Il convient donc de bien songer à tes buts avant de te lancer. Celui qui travaille… ramasse l’argent !

Et il ne faut pas oublier que même si tu délègues une grande partie des tâches, tu vas avoir celui du -gestionnaire- à faire et tu vas devoir prendre les décisions relatives à tes alpagas.

Un employé demande du temps à gérer et certaines paperasses peuvent demander ton attention également. Et comme spécifié plus haut; les employés sont difficiles à trouver en agriculture.

Comme l’animal demande des soins tous les jours, il est aussi généralement difficile de partir longtemps sans grande planification, s’ils ne sont pas en pension ailleurs.

Le temps de transformer

Fil d'alpaga lopi avec dégradé de couleurs naturelles non-teintes

Elle ne sera pas atteignable si tu souhaites vendre seulement la fibre brute; tu paieras pour travailler et prendre soin de tes animaux.

Parce que l’alpaga est intimement lié à la transformation de la fibre, il faut compter ce temps dans la balance pour obtenir la rentabilité.

La transformation peut prendre différentes formes selon le projet. Si tu veux vendre la fibre en fil à tricoter, il faut au préalable la trier et l’envoyer filer ($) (ou la filer toi-même, mais c’est exponentiellement plus coûteux en temps et demande un investissement de départ plus élevé).

Ensuite, pour avoir une rentrée d’argent plus appréciable, tu peux décider de faire la transformation en produits déjà tricotés. Dans ce cas, il va falloir soit compter le temps de tricoter (ou tisser, feutrer… ) toi-même ces produits ou engager un artisan pour le faire à ta place (qui demandera de la gestion).

Finalement, que tu décides de vendre le fil ou le tricot, il va te falloir aussi du temps pour mettre en vente ton produit.

Argent

L’élevage d’alpagas est un type qui ne demande pas de grosses sommes d’argent comparativement à d’autres.

Quand il est difficile pour quelqu’un d’avoir une ferme laitière aujourd’hui, au Québec, sans avoir quelqu’un dans la famille qui détient déjà des quotas, l’alpaga est possible pour la majorité des gens.

Cela dit, il faut quand même faire ses devoirs et être prêt à mettre un montant minimum pour avoir des animaux intéressants avec qui travailler.

Un éleveur qui démarre avec des alpagas qui ne respectent pas les standards de qualité de fibre d’aujourd’hui n’aura pas beaucoup de chance d’arriver à ses fins.

Ainsi, je dirais qu’en bas de 15 000$ – 20 000$CAN d’investissement, ce qui représente 2-3 bonnes femelles reproductrices et un peu de matériel de base, il est probablement mieux d’attendre d’économiser plus avant de se lancer.

Et cet investissement, c’est sans compter les installations où mettre les animaux et les clôtures… s’il faut bâtir une grange et des installations, il faut considérer mettre beaucoup plus.

Pour les gens qui voudraient posséder des alpagas sans en élever; sans mettre un montant minimum pour obtenir une génétique qui produit une fibre d’une qualité transformable, les alpagas seront impossibles à rentabiliser. On parle ici d’au moins 3 000$ – 6 000$CAN pour 2-3 alpagas.

Le goût de l’aventure

Même si l’alpaga est de plus en plus connu au Québec, l’expertise reste rare et un peu déficiente, tout comme c’est le cas pour les services/produits gravitant autour de la possession de l’alpaga (tonte, moulée spécialisée… etc).

En ce sens, tu dois avoir un certain goût du risque et de l’aventure pour y démarrer un élevage parce que les chemins ne sont pas tous battus devant toi, comme pour un cheptel plus conventionnel.

D’ailleurs, tu vas avoir beaucoup de travail à faire pour mettre en marché ton produit, étant une industrie nouvelle.

Tu vas avoir besoin également d’une bonne dose de résilience parce que les choses ne vont pas toujours comme on le souhaite, surtout quand on travaille avec des animaux.

Pour obtenir des réponses à tes questions, tu vas devoir faire beaucoup plus de recherches; par contre, tes réalisations et victoires vont être proportionnellement uniques !

Pour éviter de répéter des erreurs, le soutien et le mentorat d’un éleveur déjà établi et expérimenté est un atout très précieux.

Intérêt pour apprendre et curiosité

Si tu es curieux, aimes apprendre et souhaite un projet différent tu es à la bonne porte !

L’élevage d’alpagas étant une petite entreprise, tu dois mettre la main à la pâte et acquérir des compétences diversifiées, autant en bureautique, en marketing qu’en soins aux animaux.

Si tu trouves les journées monotones derrière un bureau, l’élevage sera pour toi libérateur ! Il y a diverses façons d’apprendre, mais le plus rapide reste le mentorat, encore une fois.

Certaines formations sont disponibles en français, mais la majorité le sont en anglais. Même chose pour les livres et références.

Si tu connais l’anglais, il va t’être beaucoup plus facile d’apprendre de nouvelles choses; que ce soit en faisant des recherches ou en contactant des spécialistes un peu partout dans le monde.

Élevage d’alpagas: mener son entreprise

L’élevage ou la reproduction d’alpagas est une entreprise comme toute autre; tu dois apprendre à bien mener tes affaires pour réussir et progresser dans ton projet.

Si tu n’es pas certain d’avoir la flamme entrepreneuriale, entoure-toi bien pour ton projet. Des gens d’expérience vont pouvoir t’aider à progresser et ça te mènera plus facilement vers le succès !

Être entrepreneur s’apprend même si certaines qualités, compétences et attitudes peuvent t’aider grandement à réussir. Tu pourras développer tes compétences en entrepreneuriat en lisant sur le sujet ainsi qu’en consultant les nombreuses ressources disponibles.

Y a-t-il des étapes à suivre pour devenir entrepreneur ? Un mode d’emploi ? Non, pas vraiment !

Certains cours se donnent dans les centres locaux de développement pour aider à acquérir certaines bases sur l’entrepreneuriat.

Par contre, il existe, comme dans toutes choses, plusieurs façons de se rendre du point A au point B; ton parcours sera inévitablement unique. Ta perspicacité à apprendre comment les autres ont fait pour réussir va t’être d’une grande inspiration !

Et dans tous les cas, tu te découvriras en chemin et n’aura d’autres choix que d’investir sur ta personne et qui tu es pour devenir une meilleure version de toi-même. Il est difficile de réussir en affaire quand on ne se connaît pas. Il faut connaître nos forces, nos faiblesses et parfois expérimenter sur d’autres façons de voir les choses afin d’atteindre ses objectifs.

Aimer les gens

porte ouverte UPA alpagas Fibrefine 2019

On s’imagine le propriétaire d’entreprise tout seul dans son grand bureau et l’éleveur d’alpaga seul dans une grande prairie à se promener entre ses animaux… Mais la réalité est toute autre !

La solitude en agriculture, c’est de n’avoir personne qui comprenne exactement ce que tu vis… point !

L’alpaga, surtout, attire les regards.

Même les fermes qui n’ouvrent pas leurs portes au public ont régulièrement des gens qui s’arrêtent pour prendre des photos ou veulent venir voir les alpagas de plus près.

Si tu as une boutique ou si tu fais de l’agrotourisme, tu vas certainement voir des centaines de personnes débarquer chaque année, majoritairement l’été ou lors d’événements. Parfois à l’improviste aussi et en dehors des heures d’ouverture.

Parfois ce sera de larges groupes, des fois des plus petits mais sans arrêt. Si tu n’aimes pas le monde, tu pourrais te sentir bien vite envahi !

Et je ne compte pas, bien entendu, les dizaines de téléphones que tu vas recevoir par jour; beaucoup pour essayer de te vendre une publicité, un service ou te solliciter pour une cause. D’autres pour te poser des questions sur l’alpaga, sur la fibre, sur tes produits, sur tes heures d’ouverture… et j’en passe !

Comme entrepreneur, tu va sans doute vouloir te rapprocher aussi d’autres entrepreneurs pour faire croître ton entreprise, faire connaître tes produits et tes services ou obtenir les services d’un autre.

La vie d’entrepreneur est TRÈS sociale. Si tu fais tes petites affaires calmement dans ton coin, tu pourrais perdre des opportunités pour mieux réussir et t’empêcher de voir le marché évoluer…

Conclusion

Être éleveur d’alpaga, c’est une aventure qui demande temps, force physique et de nombreuses caractéristiques d’ouverture sur le monde et sur soi-même.

Ce n’est certainement pas toujours facile (j’ai moi-même eu des périodes très sombres !).

Crois-tu avoir les qualités requises pour démarrer et devenir éleveur d’alpagas ou du moins propriétaire d’alpagas ?

17 Commentaires sur “Avoir des alpagas | c’est un projet ou un style de vie pour toi ?

  1. donald essiambre says:

    j’ai aimé lire tes commentaires pour l’aventure d’un élevage d’alpagas
    tu me semble très réaliste l’expérience sur le terrain se reflette
    je regarde que serait le mieux pour moi

  2. Sophie Auger-Léger says:

    Merci beaucoup pour cet article qui montre bien tous les aspects à prendre en compte avant de se lancer. Il y a matière à réfléchir et c’est de toute évidence un très beau projet. Merci à vous !

  3. Celine says:

    Bonjour, suite à une émission sur un éleveur d alpagas, je suis tombée amoureuse de cet animal. A 42 ans je pense très souvent à la reconversion et avoir un élevage me trotte de plus en plus dans la tête. Ce matin je cherche des infos et je tombe sur vous. Mon fils est à Montréal pour 1 mois depuis lundi. Je suis comme ça, je suis sensible aux signes que la vie envoie…
    merci en tout cas pour toutes ces infos très intéressantes et réalistes.
    Je vais me renseigner du coup un peu plus, par rapport au climat, terrain et tout le reste…
    encore merci et très bonne continuation !!

  4. cris says:

    je suis français de France et j ai apprécié ton article. nous allons réfléchir si nous devons prendre cette voix pour une reconversion professionnnel
    bonne continuation et très jolie article

  5. LEGUA Alain says:

    Bonjour Karine, je me nomme Alain, j’habite dans le Sud de la France.
    J’ai toujours eu un vif intérêt pour cet animal que j’adore.( comme tous les animaux du reste).
    Votre article m’a beaucoup intéressé et orienté.
    Je pense que je vais franchir le pas grâce à vous.
    Cordialement.

  6. Julie says:

    Merci beaucoup pour ce magnifique article qui semble dresser un portrait honnête des revers du métier! Je sais que c’est variable selon l’individu et l’année mais en moyenne, quelle quantité de laine est produite par un seul alpaga?

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