La vigogne (Vicuña), est l’ancêtre de l’alpaga. Il subsiste toujours dans son environnement naturel.
Qu’est-ce qui fait de la vigogne un animal si intéressant ? C’est un des animaux qui a la fibre la plus douce au monde, soit 10-13 microns; c’est plus doux que l’alpaga actuel.
Sa toison est encore plus recherchée que celle de l’alpaga et les articles en fibre de vigogne (aussi appelé carmeline) sont excessivement dispendieux !
Un chandail se vend environ 4200$CAN, un manteau 44 000$CAN et une écharpe 1700$CAN !!!
Cela est dû à la qualité de la fibre, évidemment, mais aussi à sa rareté puisqu’elle n’est disponible qu’en TRÈS petites quantités.
La vigogne
Plus petit que l’alpaga (1,30m à la tête pour 1,50m chez l’alpaga) et aussi plus délicat.
Toujours de couleur brune, il a le ventre, le dessous de la queue et l’intérieur des pattes plutôt blanchâtre.
Sa fibre est beaucoup plus courte que cette de l’alpaga (environ 3 cm), ce qui équivaut à environ 250g à 400g de fibre par animal (dont 150g de très haute qualité qui pourra être transformée… on est loin des 5lbs de l’alpaga!).
On note certaines différences régionales, puisqu’en Argentine, certaines vigognes ont une fibre un peu plus claire et plus longue, mais en moins grande quantité sur l’animal.
La vigogne vit en altitude élevée, sur les plateaux andins. Les groupes sauvages se composent d’environ 20 individus qui se réunissent la nuit venue; un mâle, des femelles et leurs petits.
Le petit de la vigogne reste 1 an avec le groupe avant d’être chassé pour rejoindre d’autres groupes; ça évite ainsi la consanguinité.
Passée près de s’éteindre il y a quarante ans avec seulement 5000 à 6000 têtes restantes, la population est maintenant d’environ 220 000 spécimens dont la majorité est au Pérou dans des zones à plus de 3500 mètres d’altitude. On estime qu’à l’époque des Incas, la population atteignait plus d’un million d’individus !
La vigogne était à l’époque surtout chassée pour sa viande et pour son cuir duquel on prélevait la fibre. L’homme est son principal prédateur avec le puma et le condor.
Protégée depuis 1976 et interdite de chasse à cause de la décroissance rapide des populations, le commerce de la fibre de la vigogne a également été stoppé puis a finalement repris son cours en 2002 avec des règles plus strictes, des zones protégées, des soins aux animaux et des recensements.
Chasse illégale
De nos jours, ce petit camélidé est pourtant quand même victime de chasse illégale et celle-ci fait des ravages dans les populations.
Plus de 5000 vigognes sont estimés avoir été tuées pour leur fibre au cours des huit dernières années (de 2008-2016).
Certains pays latino-américains ne reconnaissent pas la chasse illégale comme un délit sérieux et n’incitent pas au respect de la loi sur la protection des espèces.
De leur côté, les populations locales, par peur de représailles, ne dénoncent pas non plus auprès des autorités les chasseurs illégaux qui tuent pour raser sans procession les vigognes.
Les effectifs pour protéger la race sont en nombre insuffisant et les caractéristiques géographiques des régions n’aident pas non plus. Des représentants de groupes de protection ont même été menacés en 2017 par des chasseurs illégaux; ça joue dur !
Et comme la chasse illégale est profitable… tous les incitatifs sont là pour que les chasseurs continuent leur massacre ! Les autorités trouvent encore périodiquement des groupes de 100-200 vigognes abattues et rasées.
Chaccu
Traditionnellement, la vigogne est capturée vivante et rasée par les indigènes tous les 2 à 3 ans dans ce qu’on appelle le chaccu (annuel) où les troupeaux sauvages sont rabattus vers des enclos avant d’être tondus et relâchées.
Cérémonies et fêtes font partie du chaccu. Cette chasse traditionnelle est encouragée par les autorités qui protègent la vigogne et souvent organisée par des organismes sans but lucratif puisqu’elle participe à l’économie des populations andines qui sont les plus propices à vouloir ensuite mieux protéger l’animal qui leur apporte un bénéfice durable.
La présence et le travail des ONG empêche les gros groupes textiles d’utiliser les populations comme des employés dans cette chasse, ce qui pourrait amener probablement une recrudescence du braconnage.
Brute, la fibre de la vigogne rapporte entre 300-650USD par kilogrammes aux populations locales. Le Pérou exporte maintenant légalement 80 tonnes annuellement de fibre de vigogne.
En 2006, Coprovic a instauré des conditions d’élevage en semi-liberté préservant plus facilement l’espèce et la récolte de la fibre par les populations locales.
Carmeline ou fibre de vigogne
Les articles en carmeline sont pratiquement toujours laissés à leur couleur naturelle; les processus chimiques sont mal supportés par la fibre qui perd douceur et brillance.
On en fait beaucoup de manteaux, de jetées et de chandails, bien que les accessoires aient aussi la cote.
La maison Scabal, avec l’aide de scientifiques est parvenue à teindre le tissu de vigogne en bleu et en noir en 2000, ouvrant la voie à de nouveaux produits.
Paco-Vicuñas
Les paco-vicuñas sont en fait un hybride entre alpagas et vigogne qui serait probablement survenu quand des mâles vigognes se seraient accouplées avec des alpagas il y a de nombreuses années.
Intentionnellement, ce n’est qu’en 1840 que ça a été fait, afin d’aider à l’amélioration de la finesse dans l’alpaga.
Plusieurs projets ont vu le jour avec les années, mais sont toujours tombés à l’eau faute de ressources. Comme les gènes de la vigogne se diluent dans l’alpaga après 3 générations seulement, l’approche de ces éleveurs est maintenant de considérer l’hybride 50-50 comme une nouvelle race et de les accoupler entre eux seulement.
Les paco-vicuñas ont les caractéristiques principales de la vigogne au niveau de la finesse, mais présentent une fibre plus longue avec moins de poils secondaires que cette dernière. Ils sont légèrement plus petits que les alpagas (une femelle moyenne pèse 135 lb comparativement à 150 lb pour l’alpaga).
La fibre pousse entre 1 et 4 pouces par année (comparativement entre 2,5 et 7 pouces chez l’alpaga).
L’aspect de la fibre est aussi différent puisque la fibre pousse moins en mèches et que le crimp est aussi différent. La densité est une des forces des paco-vicuñas (venu de leur parenté avec la vigogne), mais par contre, ils héritent aussi d’une bonne quantité de poils de garde (toujours provenant de la vigogne), accentuant les pertes au moulin.
Une dizaine de fermes en font l’élevage aux États-Unis et le troupeau total serait d’environ 600 animaux…
L’idée de ces hybrides étant de garder la finesse de la vigogne tout en augmentant la quantité de fibre (longueur surtout) tout en diminuant le poil de garde de la vigogne… une méthode qui amène beaucoup de scepticisme de part et d’autres quant à sa réussite.
Sources: Les conséquences sociales du trafic | Wikipedia | Le luxe fragile | Chaccu | La laine des dieux / carmeline | paco-vicuña
Merci pour cette intéressante étude Je n’avais aucune idée de l’existence de cette merveille de la nature …je ne connaissais eme pas le mot « vigogne « bien que j’ai eu l’occasion d’approcher un éleveur d’alpaga … mais ceux ci sont mystérieusement morts d’on ne sait trop quoi… ils étaient pourtant parqués très à l’aise en pleine nature ….merci de nous avoir renseigné sur les moyens d’étendre ma curiosité sur les visites à la ferme et à la vente en ligne …. bien que adorant les animaux je m’interdis l’achat de leurs parures je vous remercie de ces supers renseignements Cordialement pierrette moles
Merci du commentaire Pierrette ! La vigogne n’a pas besoin d’être rasé pour sa santé mais l’alpaga oui; on peut donc acheter des items en alpaga en toute quiétude puisque l’acte de tondre n’est pas principalement fait pour récolter la fibre mais bien pour le bien-être de l’animal dont on réutilise la fibre une fois rasée, au lieu de la jeter. 😉
Merci pour cette belle publication, fort intéressante.
💗 Merci beaucoup du commentaire Michèle !